BA 102 de DIJON : Nouveau centre d'excellence aéronautique européen de l'OTAN ?
Dans de précédents articles, je rappelais que le Livre Blanc de la défense français ne semblait peu valoriser l’approche européenne, puis que la France semblait être adoubée comme leader du groupe européen de l’OTAN, où elle y a repris officiellement une place qu’elle avait auparavant officieusement déjà retrouvée sans en avoir les avantages, étant notamment une des principales contributrices de l’OTAN. A l’heure où l’on reparle de défense économique et de défense civile, il est des solutions françaises qui peuvent être trouvées par les vecteurs européens, qui plus est, co-financés par les pays de l’OTAN.
Par François CHARLES
Economiste, conseil en stratégie et management, officier en retraite, ancien responsable d’affaires industrielles internationales à la DGA, ancien expert OTAN pour l’ACCS, Président de l’Institut de Recherche et de Communication sur l’Europe (IRCE)
La Base aérienne 102, Capitaine Guynemer, dans la banlieue de Dijon est plus qu’une base, c’est un symbole pour la France et pour l’Europe. Au-delà d’avoir accueilli le héro de la grande guerre, reçu le premier groupe d’aviation en 1914, le premier drapeau de l’aviation militaire en 1916, et les Chevaliers du Ciel (bien avant top gun), elle est devenue académie de la chasse avec le Mirage 2000, posséda le premier intercepteur multi-cibles européen et réalisa les premières missions extérieures pour l’OTAN (Islande).
Après une rénovation importante de ses pistes, profitant également à l’aéroport civil, elle abrite aujourd’hui le commandement des Forces aériennes et un escadron d’Alphajet qui a retrouvé son numéro identitaire de tradition. Demain, le ciel dijonnais sera peut-être orphelin de ses avions avec notamment un impact économique sur un rayon de 100 km comme l’ont connu d’autres bases. Certes il faut faire des choix et ceux de défense sont des choix politiques de plus en plus guidés par les réalités économiques, qui peuvent même faire arrêter une guerre sans la perdre par les armes. Mais certains peuvent être pris avec sens, guidés par une certaine recherche de vision prospective européenne et une certaine prise de recul.
Telle un diamant, l’Europe est unie par ses facettes et sa diversité. Dans cet espace, le modèle multidomestique, qui maintien les identités, et donc les traditions ainsi que les compétences, semble le plus approprié. L’IRCE réfléchit à ce qu’il y a de mieux pour l’Europe sans forcément défendre une solution française. Il a inscrit dans ses sujets de défense européens, liés à l’interdépendance et l’autonomie au sein de l’OTAN, l’analyse de la création d’un centre européen de simulation opérationnelle et d’entraînement aérien voire multi-forces en Europe et mène actuellement une étude sur les modèles économiques européens de maintenance militaire placés dans un environnement global. Restait à proposer un site idéal et pourquoi pas en France, désormais en déficit structurel européen incohérent au sein de l’OTAN.
L’OTAN dispose de 18 centres d’excellence qui sont des organismes militaires internationaux, financés de façon nationale et internationale, offrant une expertise particulière pour soutenir la transformation de l’OTAN. On les trouve aux Pays Bas (2 sites), en Norvège, Estonie, Espagne, Turquie, Lituanie, Slovaquie, Roumanie, Allemagne (3 sites), Rép. tchèque, Hongrie, Italie, Belgique, Etats-Unis et en France qui possède le Centre d’Analyse et de simulation pour la préparation aux opérations aériennes (CASPOA), à Lyon. Il y est veillé à une non duplication des moyens et des ressources déjà disponibles, comme nous le connaissons aussi dans le cadre des programmes industriels européens avec l’OCCAR.
Complémentaire du centre de compétences en matière de puissance aérienne interarmées implanté en Allemagne (Kaltar), visant à améliorer la puissance aérienne et spatiale pour les opérations terrestres et maritimes de l’Alliance, et complémentaire de celui de Norfolk situé aux Etats-Unis pour celles menées à partir de la mer, et au-delà d’aider les militaires à mieux travailler ensemble, ce centre d’excellence bourguignon pourra contribuer également à la cohérence de nos fabrications respectives et européennes et à l’affinage industriel, budgétaire et humain de leur maintien en condition opérationnelle. Et nul doute que ses visiteurs n’en seront que plus heureux d’y venir de par sa région et ses spécialités locales propices aux échanges.