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Le blog philosophique de francois CHARLES

Faut-il punir ou comprendre la peur ?

4 Août 2022 , Rédigé par francoischarles Publié dans #philosophie

En temps de guerre, on fusille les présumés lâches, couards, traitres et espions pour faire des exemples sans forcément vouloir apprendre des erreurs de commandement. En temps de paix, on inflige une peine avec moqueries et bannissement même si le droit dit que l’on peut refuser d’accomplir certaines catégories d’ordres reçus. Encore une différence pour ceux qui appliquent trop le copier-coller militaire civil avec les entreprises qui font la guerre tous les jours, comme la police, avec aussi des drames pendant ou après le service qui peuvent passer inaperçus contrairement aux armées qui par-contre doivent quasiment connaitre des pertes en opérations pour être considérées et qui pourtant s’imposent des exercices difficiles pour une guerre facile.

Par François CHARLES

Politologue, sociologue, économiste, conseil en stratégie, intelligence économique et management, ancien cadre des armées.

Qui n’a pas peur ? Même le lion 8 de l’Ennéagramme devrait avoir peur que ses lionnes le quittent ! Quel acteur de théâtre ou d’entreprise n’a pas le trac ? Encore faut-il ne pas mélanger peur et raison. Le malfrat qui attaque une banque avec un jouet en bois a-t-il moins peur que le guichetier ? Pourquoi certains chefs font-ils encore goûter les plats de peur de l’empoisonnement ? Pourquoi trinque-t-on en se regardant dans les yeux ? Le stress minimal n’est-il pas porteur de bon sens, même pour aller au combat en guerre militaire ou en affaires avant qu’il ne se transforme en angoisse ? En 1914, ont-ils eu peur de servir de chair à canon pour Nivelle et que faire ensuite des traumatisés qui appellèrent leur mère sur le champ de bataille ? Etaient-ils des contingents de février qui partent n’importe où en confiance de leur chef comme avec Du Guesclin, ou d’Août qui réfléchissaient souvent à la mission et s’il était intelligent d’aller au carton de façon irréfléchie ? Pétain, le bout en train lui-même avait changé avec de grands résultats. Quant aux Gaulois, s’ils avaient seulement peur que le ciel leur tombe sur la tête, d’autres utilisaient la peur pour se donner des ailes… et se tirer (d’aile). Mais est-ce de la peur de ne pas répondre à certaines provocations faites par des personnes semblant être protégées ou ne pas tabasser l’agresseur d’une vieille dame pour éviter de récolter une plainte ?

Certains ont peur à cause de l’inconnu quand d’autres ont peur à cause du vécu et de l’échec et parfois les mêmes qui choisissent entre être courageux et téméraires. Le chef d’entreprise peut avoir peur après une première faillite surtout non accompagnée, comme un employé après un licenciement par sa faute ou celle des autres. Le cycliste ou le skieur peut avoir peur d’une descente après une mauvaise chute comme le parachutiste lors du deuxième saut si le premier s’est mal passé. Plus près de nous que penser de l’automobiliste rescapé d’un accident qui doit reconduire immédiatement car c’est bien aussi un outil pratique et vital pour lui. Certains ont peur pour leur famille ou de ne pas avoir pu accomplir sa vie assez de choses dans leur vie. Certains préfèrent se cacher ou se retrancher chez eux ou leur château plutôt que faire face et combattre comme pendant la guerre de 100 ans. Mais certains préfèrent aussi manipuler pour éviter de combattre eux-mêmes et arriver à des résultats souvent plus grands.

Que dire de ces psychothérapeutes qui préfèrent se moquer des personnes vivant sur leurs peurs qui sans doute sont plus aptes à analyser et maitriser les risques et agir en connaissance de cause avec succès mais aussi défaillances vécues. Qui peut vraiment comprendre sans l’avoir vécu ce que peuvent représenter le phoenix et la résilience, certes nouveau mot à la mode, mais signifiant que l’on peut en ressortir nouveaux après un deuil fait même s’il ne s’agit d’ailleurs pas d’une erreur commise par soi-même mais simplement d’un fait traumatisant. Bien entendu, beaucoup de spécialistes diront qu’il est toujours possible de surmonter ses peurs. Que dire des chefs irresponsables qui ne s’arrêtent pas quand ils déraillent quand d’autres démissionnent alors qu’ils ne le devraient pas.

 

Je vais aussi me permettre une histoire assez significative. De retour de manœuvre lointaine déjà assez éprouvante, un chef de corps ordonna à son régiment de faire le tour du terrain d’entrainement voisin de nuit, feux éteints et avec équipements nocturnes, sous prétexte que quelqu’un ne le connaissait pas alors que la menace russe était plutôt plus importante sur d’autres terrains. Un char s’est immobilisé. Au retour le chef de char, pourtant plutôt casse-cou et preneur de risques que craintif, a été ensuite sanctionné, blâmé, dénigré, poussé dehors à la place et pour le compte du pilote qui « ne voyait rien » et qu’il aurait peut-être pu guider en sortant la tête s’il n’avait eu certaines appréhensions. Plutôt que sanctionner pour donner l’exemple et considérer ce leadership responsable plutôt qu’incriminer le pilote, ces chef de corps et d’escadron auraient pu aussi incriminer la technique ou se rappeler que l’équipage venait de vivre des moments marquants. Le char avait en effet glissé sur la neige dans un fossé avec les mêmes réalités et le chef de char avait été miraculé d’avoir rentré sa tête une seconde avant de percuter l’arbre qui a détruit sa mitrailleuse et pour laquelle il a presque été sanctionné. Ils ne savaient pas non plus que le même peloton s’était heureusement arrêté à quelques mètres d’un précipice lors d’un autre exercice de nuit, entendant que le pilote « ne voyait plus rien ». Un ange gardien était là. Après un certain purgatoire, le sanctionné fut rétabli par des chefs intelligents au grand étonnement des précédents qui le revirent dans les dimensions des sphères parisiennes avec des prises de risque ô combien plus importantes mais sorti de cette vie de terrain que d’autres maitrisaient et se contentaient peut-être mieux à leur niveau. La peur était-elle finalement un argument que certains ont fini par comprendre même s’il fallait en payer le prix pendant longtemps.

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