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Le blog philosophique de francois CHARLES

LES TROIS PILIERS DE L’INTELLIGENCE ECONOMIQUE AU SERVICE DE LA DEFENSE NATIONALE

31 Mai 2020 , Rédigé par francoischarles Publié dans #stratégie

L’intelligence économique (IE) est essentiellement tournée vers le monde des entreprises et souvent synonyme soit d’espionnage industriel avec ses méthodes et techniques de veille, soit de protection issues du domaine militaire et de la sécurité. C’est souvent oublier leurs liens transverses qui en font une approche globale et une attitude globalement responsable.

Il est également peu courant de considérer la démarche inverse qui consiste à valoriser cette fois cette l’approche d’IE, enrichie des pratiques civiles, au profit des trois piliers de la défense nationale. Il sera d’abord intéressant de connaître la vision globale de la notion de défense nationale, puis de l’approche globale de l’intelligence économique et enfin du retour de liens entre l’IE et la Défense Nationale.

 

Par François CHARLES*

Officier de l’armement en retraite, fondateur de NOVIAL®, conseil en stratégie, management , occupa des postes à responsabilité au niveau national et international à la DGA, dans l’industrie et les services et dans un grand cabinet d’audit. Il est ancien élève de l’ESCP-EAP, titulaire d’un DESS de Défense et dynamiques industrielles à Assas et doctorant à la Sorbonne

retrouvez la stratégie et le management sur http://novial.overblog.com ; article également paru dans le Revue de Défense National

*             *             *

I – QU’EST-CE QUE LA DEFENSE NATIONALE ?

La notion de Nation est récente. Elle date du 18°, voire du 19° siècle. On parlait jadis davantage de territoires, de subordination à un Seigneur. Les mercenaires étaient monnaie courante, les batailles pouvaient être menées en intégrant des capitaines fortunés venant avec leur troupe moyennant finance, forme de partenariats Public-Privés. La vraie Nation française est née de la révolution. Nos empereurs ont contribué quant à eux à créer directement ou indirectement la nation allemande.

La défense nationale doit être considérée comme étant militaire, mais également civile et économique. La première est la plus connue. Certaines de ses composantes matérielles et humaines nous sont dévoilées tous les ans à l’occasion de la fête nationale à l’exception des composantes navales, souvent porteuses de merveilles et fiertés technologiques. N’oublions pas non plus toutes les infrastructures et leurs senseurs qui permettent la surveillance du territoire. Toujours trop chère quand il n’y a pas de conflits, la défense militaire permet notre indépendance et notre réaction face aux menaces et aux risques diffus.

Forces armées et réserve

Les forces armées

Les composantes de la défense militaire, que sont l’armée de terre, la marine, l’armée de l’air, la gendarmerie ont pour mission de préserver les intérêts vitaux de la France contre toute forme d’agression. Elles assurent les missions opérationnelles de réduction de l’adversaire mais aussi les missions de maintien et de retour à la paix pour le respect du droit international, avec souvent une forte composante humanitaire et peuvent assurer des tâches de service public. Pour remplir ces missions, les différentes armées sont appuyées par le service de santé et le service des essences et la Direction Générale de l’Armement, qui assure l’adéquation industrielle des besoins et la tutelle des industries de défense. La gendarmerie a pour mission de veiller à la sûreté publique et d’assurer le maintien de l’ordre et l’exécution des lois.

La réserve

La réserve est à la fois comme un instrument de communication privilégié entre la défense et la société civile et un outil efficace intégré aux forces armées. Elle se compose de  la réserve citoyenne qui accueille les personnes désireuses de participer à la promotion de l’esprit de défense et soucieuses de mieux faire connaître l’outil militaire. Elle permet aussi aux armées d’accéder à un véritable réservoir d’expertise de haut niveau dans les domaines essentiels des affaires civilo-militaires et de la santé, par exemple. Le concours de ces personnels est également nécessaire pour assurer des missions de sécurité et de protection du territoire.

Il faudra toujours des armées sur un territoire tant que tout le monde aura pris la décision de ne plus en avoir, ce qui peut être espéré mais illusoire. La dissuasion nucléaire permettant de faire réfléchir tout ennemi trop belliqueux face à une riposte disproportionnée semble maintenir cet équilibre instable. Mais là encore, après avoir assuré un contrôle des anciennes armes soviétiques, les menaces potentielles coréennes et iraniennes, certes désormais limitées, nous rappellent qu’elles peuvent néanmoins enflammer le monde. Un monde sans armée n’est pas impossible mais semble illusoire sine die car supposerait que tous les Etats détruisent leurs moyens dans la même période avec un contrôle mutuel. Une autre option consisterait à n’entretenir que des forces d’action rapides communes et nécessaires pour contrer les risques de groupes incontrôlables. Mais limitées à qui ? Qui fera le premier pas ?

Les grandes menaces comme celles liées autrefois entre le bloc de l’Est et le bloc Occidental n’existent plus en occident et l’objectif européen de vivre dans un espace de paix et de sécurité semble être atteint. Nous avons néanmoins du passer par le vecteur économique du contrôle et de l’unification de l’industrie européenne du charbon et de l’acier. S’en est suivi le Traité de Rome sur la formalisation du ciment économique qui peu à peu fait oublier les cicatrices historiques du passé. De la même façon, on peut considérer actuellement l’OTAN, quasi copier-coller de l’Union, et liant ensemble des Etats pour des opérations militaires mais également industrielles moins connues, comme étant un vecteur d’intégration, de stabilité et de sécurité européenne.

Les événements en ex-Yougoslavie n’auraient peut-être pas eu lieu avec une intégration plus rapide mais alors impensable de ces Etats. Les interventions ont lieu désormais souvent à l’extérieur du territoire national pour mieux le sauvegarder, comme c’est d’ailleurs le cas pour la politique extérieure européenne. On voit aussi se former de grandes coalitions, qui se mettent en route comme lors des croisades, parfois uniquement dans les airs comme avec la Lybie, face à un ennemi bien identifié avec des structures, des uniformes et des moyens. Mais les menaces ont également laissé la place à des risques diffus, imprévisibles et difficiles à combattre et qui peuvent aussi frapper le territoire national avec des conséquences désastreuses pour la population. A la chute du mur de Berlin, une adaptation fut nécessaire pour rapidement apprendre à détecter et éteindre les flammèches dans la moitié du monde. Mais c’est une nouvelle forme d’ennemi qui est apparu sur un territoire où on ne l’attendait pas. Le risque se transformait de nouveau en menace.

Les interventions extérieures qui déplacent les guerres en dehors de nos territoires font désormais oublier les deux autres composantes que sont la défense civile et la défense économique pourtant très liées et qui mettent un regard et une vision globale sur la prise de conscience de l’identité et du poids de la nation pour assurer une stabilité, garante souvent de paix.  Certains pays comme par exemple en Suisse, en Israël ou en Finlande savent encore en prendre conscience de façon permanente. Les réalités économiques, opérationnelles et sociales, ayant justifié l’abandon de la conscription, auraient pu, comme préconisé, revaloriser leur consistance.

Les défenses civile et économique

La défense civile

La défense civile peut se résumer à l’organisation des secours, la sauvegarde de la sécurité intérieure, du système administratif, de la population et installations ou moyens civils qui conditionnent le maintien des activités indispensables à la défense et à la vie des populations. Elle fait appel à la population et au système administratif (ministère de l’intérieur, départements et communes) garant de la solidité d’un Etat. Il s’agit concrètement de parer et gérer les risques liés aux catastrophes naturelles et industrielles, aux infrastructures vitales, à la santé publique par le terrorisme, les agressions ou accidents de nature nucléaire, radiologique, biologique et chimique, la cyber-criminalité. Il s’agit enfin d’assurer la planification des interventions, la protection des infrastructures, la gestion et communication de crise et l’assistance aux populations.

Elle a été activée par exemple pour les taxis de la marne, pour les bombardements de Londres. Elle l’est quand il est demandé de signaler tout colis abandonné. Elle le sera quand une bactérie sera déversée de façon mal intentionnée dans un réservoir d’eau potable ou dans le métro. Elle agira aussi pour faire vacciner en masse la population à travers les aérations des grandes surfaces sans forcément l’alerter et surtout éviter les paniques. C’est une vraie prise de responsabilisation face à l’ennemi visible ou invisible et à notre survie. Mais en temps de paix, assurer la défense civile peut consister aussi à aller surveiller un bureau de vote…

Il existe un Haut Comité Français pour la Défense Civile (HCFDC), qui participe à la réflexion sur la doctrine, l’organisation et les techniques de notre pays en matière de sécurité globale.

La défense économique

La défense économique est organisée par le ministre chargé de l’économie, sous l’autorité du Premier ministre et avec le concours du secrétaire général de la défense et de la sécurité nationale. De par sa mission régalienne, traitée au niveau des zones de défense, et très liée à la défense civile, elle veille au bon fonctionnement général de l’économie, concourt à la prévention et la gestion des crises susceptibles d’intervenir suite à des perturbations provenant de menaces ou de risques intérieurs ou catastrophes naturelles. Mais elle veille quant à elle à la protection du patrimoine, essentiellement industriel, à nos ressources naturelles, au système financier, à nos moyens de communication et nos approvisionnements garants de l’indépendance du territoire. Elle met en œuvre des structures opérationnelles de gestion interministérielle des crises (COGIC, COB, COIA…)

Elle est activée quand nous transférons nos usines hors de portée de l’ennemi, quand nous déployons l’effort industriel de guerre en transformant notamment les moyens civils par réquisition, quand nous limitons l’accent à nos entreprises aux capitaux, aux auditeurs et aux assureurs étrangers mais aussi quand nous protégeons nos systèmes d’information et nos brevets.

Comme la défense civile, la défense économique voit son importance croître, au regard des menaces et des vulnérabilités nouvelles et elle doit désormais aussi s’insérer dans le cadre de la construction européenne. De par une mission économique partenariale avec les entreprises, la défense économique développe désormais également des politiques de sécurité des systèmes d’information, de protection du patrimoine industriel, en faisant intervenir depuis longtemps les organismes tels la gendarmerie, la DCRI ou spécialisés de la DGA (Centre d’Instruction de Sécurité Industrielle de l’Armement - CISIA) pour sensibiliser sur la sécurité. Depuis les travaux sur l’intelligence économique en France avec le rapport Martre et ensuite notamment la mise en place, pendant une certaines période, d’un Haut Responsable de l’Intelligence Economique, la défense économique mobilise nos entreprises et les structures étatiques à Paris ou en région ou consulaires de tutelle chargées de les accompagner dans la dynamique et la maîtrise de concurrence. IL existe désormais des formations diplomantes en IE et une école de guerre économique.

Les guerres portées sur les territoires extérieurs font trop oublier les risques que la population peut subir à l’intérieur par des actions de coups d’éclat et de guérilla sans vrai ennemi identifié, même si cette méthode fut employée également par des armées régulières. Qui fait désormais attention aux militaires du plan Vigipirate devenu permanent et qui fait  désormais dans la vie commune ? Fallait-il les attentas du 11 septembre pour l’instituer ? N’est-ce pas une mission de conscience de chaque citoyen ?

Il existe un Comité de Défense Économique au sein de l’Association Nationale des Auditeurs Jeunes (ANAJ) de l’Institut des Hautes Études de Défense Nationale (IHEDN) qui a pour objectif de sensibiliser les membres de l’ANAJ et la population civile de manière générale aux problématiques de défense économique

Il serait incomplet de terminer ce panorama sans parler de la sensibilisation au devoir de défense à travers le parcours de citoyenneté, qui informe les jeunes Français depuis la classe de 3° sur les principes et l’organisation générale de la Défense Nationale et de la sécurité collective en remplacement du service militaire. Avec trois étapes obligatoires que sont l'enseignement de défense, le recensement et la Journée Défense et Citoyenneté au cours desquelles interviennent successivement l'Éducation nationale, les mairies et la Défense, les jeunes sont informés sur leurs droits et leurs devoirs pour les aider à mieux comprendre le fonctionnement des institutions de leur pays. Il apprennent des gestes de survie, peuvent partager avec des personnels militaires et civils et peuvent passer des tests d’orientation pour mieux trouver leur avenir dans la société et pourquoi pas dans la défense en service actif ou dans la réserve.

En outre, cet enseignement de Défense est complété, dans les cours d’ECJS (Education Civique, Juridique et Sociale) des classes de première et terminale où la formation civique des élèves exige une réflexion sur la politique de défense, sur les conditions de sécurité et la diversification des menaces dans le monde d’aujourd’hui. Elle peut aborder intelligemment tous les aspects de la défense nationale et de ses relations avec notre patrimoine pour commencer à développer une réelle prise de conscience et une attitude transverse

Désormais, les guerres sont essentiellement économiques, sauf dans certaines parties du monde. Si vous vous rendez à Waterloo, vous pourrez voir une plaque de Victor Hugo qui parlait déjà des futures guerres économiques. Mais le message était apparemment précoce et la guerre militaire et mondiale est repassée par là avec son lot de destruction mais aussi d’assainissement, de reconstruction et de régulation économique imposant de réfléchir de façon globale, avec intelligence…

                                                            *     *     *

II - QU’EST-CE QUE L’INTELLIGENCE ECONOMIQUE (IE) ?

Identifions l’historique de l’IE.  L’espionnage a toujours existé mais ce vocable d’intelligence  est apparu à partir du second conflit mondial avec la création d’organismes portant le terme anglais d’« intelligence ». Il n’avait pas le terme d’approche globale telle que développé en économie mais le côté particulier et confidentiel « d’en connaitre ».  Au fait pour l’anecdote, savez vous pourquoi dit-on CIA et non « la » CIA ? Parce qu’on ne dit pas « le » Dieu… C’est ce terme d’espionnage, légal ou illégal  qui a pourtant un rôle clé dans l’entreprise mais qui n’est pourtant qu’un aspect de l’IE car qui dit veille dit donc aussi protection et organisation. L’espionnage et le renseignement ont servi et servent toujours à  gagner les guerres, identifier les crises, déjouer les plans, lancer de fausses informations, rédiger à sa manière, avoir le pouvoir de l’information. Il est civil et militaire l’Etat dans des organismes différents souvent connus de nom tels le MI5, MI6, CIA KGB, GRU, DGSE, DRM, DCRI, travaillant pour la sécurité intérieure ou extérieure, ou souvent trop méconnu comme la NSA qui pourtant est à même de traiter les 80 % d’informations ouvertes en interceptant dans le monde tout email potentiellement suspect pour la sécurité des Etats-Unis, voire de leurs alliés.

Même avec la plus grande volonté du monde, le cloisonnement est toujours très fort entre chaque service à cause de ce pouvoir de l’information.

En France, le genre d’exercice que nous menions pour collationner les informations stratégiques financières, commerciales et industrielles, notamment dans mon cas pour défricher l’Asie industrielle, était tellement fastidieux que nous avons décidé dans les années 1990 d’engager une démarche d’intelligence économique permettant d’aboutir à cet alambic plus facilement, comme mentionné en première partie. La création de l’ADIT en a été un support efficace.

 

L’IE est définie comme étant "la maîtrise et la protection de l’information stratégique pertinente pour tout acteur économique". Elle s’adresse aux entreprises mais a pour finalité la compétitivité de l’économie et la sécurité de l’État. On peut la résumer en trois parties corrélées :

-          protection et capitalisation de l’information détenues par toute forme d’organisation (entreprise, collectivité…) afin de connaître, et exploiter les données notamment stratégiques détenues, grâce à des outils dédiés (gestion de bases de données)

-          veille et développement par toute forme de moyens matériels, humains et procédures permettant de connaître l’environnement concurrentiel et de prendre les bonnes décisions d’orientation et d’action

-          et enfin lobbying, ou encore techniques d’influence, mettant surtout en avant l’aspect humain et les compétences de communication envers les institutions afin de disposer d’un effet de levier en amont des grandes décisions économiques

Le premier point consiste à protéger et sécuriser les données sensibles comme les brevets et le savoir-faire pour maintenir ses marchés et ses clients et donc son chiffre d’affaires. Tout responsable d’entreprise évalue-t-il sa vulnérabilité ? Maitrise-t-il les informations stratégiques nécessaires au pilotage de l’entreprise, se préoccupe-t-il de préserver le savoir-faire, le patrimoine humain, technique, industriel ? Prend-il conscience de risques de fuite d’informations sensibles vers la concurrence, copie, contrefaçon, attaque de l’image de l’entreprise, déstabilisation des locaux et des systèmes informatiques, contrôle-t-il les vecteurs de fuite possible (personnels, stagiaires, prestataires, partenaires…), les moyens de promotion (plaquettes, site, salon, presse…), la sécurité des accès ? Possède-t-il les bons systèmes de sécurité et d’informations, a-t-il nommé un responsable, des procédures et consignes sont-elles mises en place ? Il s’agit parfois simplement de capitaliser les connaissances et les informations de fonctionnement pour veiller à la bonne conduite de l’organisation : informations techniques, économiques, financières pour une réactivité plus rapide, et ce avec des outils de systèmes d’information pour faciliter la prise de décision. Il s’agit surtout de maîtriser le risque humain : informer et sensibiliser les employés pour les règles dans l’entreprise mais surtout aussi en dehors (trains, séminaires, foires, restaurants etc, sensibiliser les négociateurs, faire attention aux assureurs...

La passion d’un contrat fait souvent oublier qu’il est souvent bon de retenir sa langue et de signer les précautions d’usage, que le congressiste et le chercheur passionné oublient souvent à qui ils parlent, que les techniciens savent faire partager leur métier avec passion, trop peu en interne et souvent trop en externe, qu’un trajet de TGV ou un vol paris-Tokyo peuvent remettre en cause plusieurs années de bienveillance, que le vol répréhensible d’une valise n’arrive pas qu’aux autres, que l'e-mail qui traverse la salle peut passer par les Etats-Unis, que le téléphone peut être un outils de photographie, que le bluetooth est indolore mais détectable. Le responsable d’entreprise prend il conscience que Les vendeurs sont des mines d’information, que les distributeurs, fournisseurs et clients bavards sont parfois peu respectueux des règles de sécurité élémentaires, que les acheteurs peuvent être vulnérables  face à une jolie fille… et trop souvent on croit de façon cloisonnée que cela ne s’arrête qu’aux frontières de l’entreprise et que cela n’impacte que cette dernière alors que les effets induits peuvent se propager pour fragiliser notre tissus industriel entier et donc nos capacités de défense.

Au niveau de l’Etat, on pourra par exemple définir la liste des entreprises stratégiques sur lesquelles pourra être porté un regard particulier quant à leur patrimoine technologique et leur prise de contrôle. On pourra par exemple contrôler si ses visiteurs Japonais n’utilisent pas leur cravate en guise d’éponge, ou si le stagiaire ne va pas trop traîner dans les couloirs en dehors des heures de service… L’IE se chiffre en perte de partenaires, de clients, de marchés, de savoir-faire, contrefaçon.

Mais l’IE se chiffre également et heureusement aussi en parts de marché obtenues sur la concurrence dans son environnement global. C’est bien cette seconde composante qui est la plus connue et répandue mais elle doit être réalisée en cohérence avec la première pour éviter tout pillage ou contre-attaque désastreuse pendant que les forces sont concentrées à l’action, comme pendant la campagne de France où il fallait donner du temps aux troupes françaises de revenir de Russie ou  comme si tous les joueurs d’une équipe de foot, et même leur gardien, étaient concentrés à l’avant sous-estimant le risque d’un but par une balle longue ou une percée soudaine…

 

Outre les forces de Porter (schéma ci-avant), elle s’alimente également du modèle PESTEL et de la répartition des influences environnementales politiques, socio-culturelles, économiques, écologiques, technologiques et légales

Même dans une stratégie de niche, il conviendra de garder ses parts de marché en surveillant les comportements des clients et prospects, voir s’ils se tournent ils vers un autre fournisseur, sur quel produit, pour quelles raisons… ; trouver de nouveaux débouchés en observant l’évolution du comportement des consommateurs finaux,  l’environnement du marché (que font mes concurrents, que fait la tendance), l’environnement juridique (la réglementation évolue-t-elle ? en France, en Europe, dans le monde..) et l’environnement technologique surtout s’il s’agit de recherche collaborative, socio-économique et financier. La veille sera effectuée sur ses concurrents, en prenant les bonnes traces et détectant les pièges ou les  nouveaux types de marchés, en sachant comment les aborder et savoir décrypter de nouvelles réalités pour se développer, analyser les vecteurs d’optimisation, développer de nouveaux produits correspondants aux besoins identifiés.

On peut citer l’exemple de producteurs de vins ayant su « créer » un produit adapté au marché asiatique sans qu’il ne corresponde plus au marché français ou européen. On utilisera nombre d’outils technologiques (photos avec appareil miniature ou téléphone portable, clé USB dévoreuse), ou internet (moteurs de recherche) abreuvant d’informations mais laissant trop de côté la prise de recul et l’approche humaine, autrefois privilégiée. Un simple rapport d’étonnement, alimentant les éléments indissociables mais bien souvent trop cloisonnés du triangle magique entre la  production, le marketing et le commercial, est parfois une grande valeur ajoutée. Il est intégré culturellement dans la culture militaire mais également asiatique. Les limites légales avec poursuite pénales de la veille peuvent être atteintes si vous abusez de la bombe cryogénique pour lire le courrier et pour percer certains secrets d’affaires.

Enfin, ces deux éléments de la « chaîne de valeur » seraient orphelins s’ils n’étaient complétés par le lobbying. Beaucoup plus naturelle outre manche et outre atlantiques, ces techniques d’influence vous permettrons  d’une part, de devenir un acteur privilégié et incontournable de remontées et d’échanges d’informations auprès des acteurs publics nationaux ou européens et d’autre part, d’obtenir des modalités favorables sur les décisions réglementaires, risquant de porter atteinte ou de favoriser indirectement une augmentation le chiffre d’affaires ou une croissance de parts de marché. L’influence par souvent par la confiance, la ressemblance, l’appartenance aux mêmes réseaux. Même à compétences différentes, on laissera plutôt un X Mines aborder un autre X mines

L’information ouverte (80%) est librement accessible, légale, acquise en connaissance de cause des émetteurs et propriétaires, sans moyens sophistiqués.  Elle sera issue de sources techniques, formelle  et documentaires écrites et audio-visuelles et … leurs limites : internet, de la presse, revues, radios, communiqués, publicités,  Images, dessins, photos, dépliants, maquettes, organigrammes, plaquettes, journal interne, banques de données, annuaires…Nous pouvons lui attribuer  un coefficient de valorisation de 1, voire inférieur. Les outils ne remplacent ni l’intelligence de pensée, ni le contact qui rentent les atouts essentiels. Même avec un bon système d’information, une donnée fausse en entrée donnera un résultat faux en sortie et il faut également savoir « mettre un coup de tamis  pour séparer le bon grain de l’ivraie grâce à certains outils de recoupement car « trop d’info tue l’info ». Certains profils de personnalité sauront également mieux détecter le bruit insoupçonné et étrange, parmi tous ces bruits, comme dans un sous-marin.

L’information restreinte et relationnelle et confidentielle (15%) est orientée, issue d’un filtre, d’une valeur ajoutée réservée à un nombre restreint, peut être issue de recoupements eux-mêmes non confidentiels, d’une  notion d’échange intuitu-personae, d’échanges parlés, off the record, de prises de notes.  Elles nécessitent un travail personnel de l’individu qui veut les collecter : Être au contact, sentir, toucher, percevoir…Savoir créer et entretenir la relation informelle. Nous pouvons lui attribuer un coefficient de valorisation de 5

L’information secrète (5%) est celle qui fait fantasmer toutes les personnes de pouvoirs politiques, militaires ou économiques car on accorde plus de valeurs aux choses rares. C’est un peu l’élément qui va faire de votre soupe une potion magique ou bien le résultat d’un processus d’alambic  qui fait de votre macération, une boisson forte à 60 degrés et où il est parfois difficile de se cantonner  dans la légalité pour l’obtenir pour la rendre encore plus savoureuse. Son coefficient est proche de 10

Les interlocuteurs des entreprises ou autres organisations sont la gendarmerie, direction centrale du renseignement intérieur et le pôle « entreprises, économie, emploi » de la Direction Régionale des Entreprises, de la concurrence, de la consommation, du Travail et de l’Emploi (DIRECCTE)

L’IE représente donc une démarche pluridisciplinaire. Mais l’organisation qui tirera le meilleur profit de l’IE est celle qui aura su disposer ces trois éléments dans l’alambic et en extraire l’élixir, la substantifique moelle qui la mettra à la fois à l’abri mais surtout devant les autres. Comme pour une analyse de risque, le travail le plus important sera bien la prise de recul et l’identification de l’information nécessaire à la prise de décision. Savoir prendre une heure de plus avant de foncer peut faire gagner un an de travail et de l’argent. Et ce travail est d’autant plus atteignable et efficace dans une PME à taille humaine  alors que ces dernières se sentent faussement hors de portée de l’IE. Le fait qu’elles maîtrisent le facteur humain qui permet de comprendre qu’une pièce seule du puzzle ne vaut rien mais que toutes ou quasi les pièces assemblées peuvent devenir ensemble, confidentielles. Reste souvent à mettre en place les outils d’accompagnement et l’envie de chasser en meute, sauf si par chance un grand groupe accepte un portage bienveillant et efficace, ce qui est rarement le cas.

L’IE est également une attitude responsable à développer. Il est facile de passer à coté de l’information si on na pas été exercé à la déceler ou à la faire circuler. Une prise de conscience peut être bénéfique pour l’entreprise en transformant le « pouvoir sur » interne et dangereux en « pouvoir pour » externe pour une mobilisation au profit de l’organisation. Et un entraînement peut aussi déceler que l’on ne voit qu’une partie de l’iceberg, éviter de passer à côté de la question posée, comprendre et décrypter les messages cachés, l’information ou la désinformation (où se situe vraiment Alesia ? César n’a-t-il pas gonflé ses chiffres ? La guerre de Troyes a-t-elle eu lieu…), passer au-delà du pouvoir des cigles ou alors savoir l’utiliser.

Ces trois composantes de l’IE sont finalement le lien permettant de comprendre le pouvoir de l’information qui peut être considérée comme un symbole, un signe extérieur de statut pour les managers, au même titre que la surface d’un bureau et son nombre de fenêtres. Elle conforte les décideurs dans leur statut, certains abonnements donnent de l’importance à ceux qui les reçoivent…en étant sûr que les collègues ou les clients, fournisseurs le savent ! Elle a donc un rôle majeur dans les organisations mais aussi pour les négociations militaires et technologiques avec parfois des travers comme dans l’affaire Renault. Mais s’il fallait retenir un élément positif de cet événement c’est bien qu’il s’agissait cette fois d’informations sur le modèle économique et non plus sur la technicité elle-même, un peu comme si on s’intéressait, dans le domaine militaire, enfin à la prise de conscience et du poids de la logistique et de la maintenance au-delà de l’aspect technologique du produit comme nous le verrons dans la troisième partie.

Il en est de même pour la contre-intelligence. Souvent l’humain prend une décision de protection ou de contre-attaque quand un de ses proches ou lui-même est confronté à un problème sans s’y soucier vraiment auparavant. Mais parfois il a l’intelligence d’assembler certaines informations pour susciter l’intérêt comme quand le roi faisait garder les champs de pommes de terre la journée seulement…afin que la population s’intéresse à cet aliment…

On peut se rappeler les 10 commandements de l’IE : définir les besoins en information, collecter l’information ouverte, ne pas négliger l’information "informelle", hiérarchiser et traiter l’information recueillie, diffuser l’information à point nommé, mesurer la satisfaction des destinataires, protéger les données sensibles et le savoir-faire, influer sur l’environnement, bannir définitivement la naïveté tout en évitant de verser dans la paranoïa , obtenir l’adhésion de tous.

Fort de ces composantes et cette prise de conscience, il peut s’avèrer intéressant d’analyser et capitaliser les impacts séparés de l’IE sur la défense militaire, la défense économique et la défense civile mais surtout l’impact global des trois composantes de l’IE sur les trois piliers de la défense.

 

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III –L’INTELLIGENCE ECONOMIQUE AU SERVICE DE LA DEFENSE NATIONALE

Les objectifs des guerres étaient et demeurent  de différentes natures : luttes de pouvoir, réaction à humiliation, volonté de possessions territoriales (colonies), voie logistique stratégique à acquérir (Afghanistan), volonté de richesses ou de bloquer les richesses (blocus). Tout rappelle le monde de l’entreprise. Les guerres utilisent souvent des renseignements sur les moyens et les matériels de l’ennemi à l’aide de la presse, des audits d’assurances, des fournisseurs de matières premières, de machines.

Importée dans le monde de l’entreprise comme internet l’a été par une application industrielle à l’origine faite pour les militaires, La puissance de l’IE valorisée d’apports méthodologiques d’entreprises et d’organisation (stratégie, risque, marketing, psychologie…) peut désormais aider en retour notre pays et notre Europe à « penser autrement pour agir autrement [1]» dans le domaine de la défense d’une part pour mieux se protéger et sensibiliser la population aux risques, d’autre part pour mieux gagner les guerres, gérer les conflits ou veiller aux menaces et enfin pour aider nos politiques à mieux communiquer auprès des instances nationales et internationales dans les thèmes de la défense ainsi que faire valoir notre patrimoine et notre identité

Ces liens peuvent être imagés comme une roue d’auto alimentation continue (voir schéma) passant par les techniques militaires au service de la défense et du territoire, par les guerres économiques qui remplacement peu à peu des guerres militaires et enfin par les compétences, la vision et les attitudes  globales de l’entreprise au service de la nation et notamment de la notion de patrimoine technologique à sauvegarder au service de la défense et de l’identité nationales.

 

 

Analysons ces retours respectivement sur chaque composante de la défense nationale

On trouve des exemples d’utilisation du renseignement et de l’information de tout temps pour l’usage militaire : les espions de l’empire romain et ses alliances, la rédaction particulière de la guerre des Gaules par César, la guerre froide entre Napoléon et l’Angleterre sans affrontement direct sauf à Waterloo, la perte de Sedan à cause de la  presse. Le vecteur humain, très utilisé au départ, fut remplacé peu à peu par des outils d’écoute, de photographie, de lecture, de décryptage comme le ballon, l’avion, le drône, le satellite, la valise Enigma, l’électronique, les outils informatiques et les réseaux. La NSA et le réseau échelon peuvent intercepter un email contenant des mots clés, d’une pièce à l’autre de votre établissement si vous ne l’avez pas protégé…). Rien ne valent parfois certains langages ethniques peu utilisés qui ont pu faire encore leurs preuves pendant la dernière guerre mondiale. On pense même à revenir au bon vieux pigeon voyageur.

Mais une approche d’ensemble mêlant stratégie, processus et psychologie aurait peut-être pu prolonger un peu la ligne Maginot, qui allait jusqu’en Italie, au-delà des frontières directes dangereuses pour mieux valoriser les milliards de francs or dépensés. Quel était le risque encouru ? Dépenser quelques millions de plus et froisser les Belges ou perdre d’un coup une économie, une puissance et une image réputées fortes. Consolons nous en nous rappelant que la France a pu inscrire une victoire sur cette ligne en 1940, qui est venue se rajouter à celle du Général de gaulle, alors Colonel, avec ses chars. Les guerres nouvelles, plus technologiques et plus précises, s’inspirent davantage de l’approche globale.  L’attaque de l’OTAN sur la Libye nécessitait une connaissance parfaite du terrain et des relais permanents pour des frappes chirurgicales apparemment sans dommages collatéraux.

Puis les outils et méthodes militaires se sont mis au service de l’industrie et du commerce : sauvegarde des comptoirs marchands, protection des convois, réalisation de matériels militaires pour gagner les guerres militaires telles fusées, missiles, avions, bateaux, Helios, laser…, investissements dans le savoir-faire industriel, les usines, la recherche  qui a coûté sa place à la Russie sur la scène économique internationale avec l’essoufflement de la guerre des étoiles, marchés de haute technologie (TGV, avions…), composants électroniques, brevets déposés.

On assiste maintenant à un retour sur les fondamentaux pour les outils militaires ou civils confidentiels. Le maillage français performant du système Rita, permettant de faire passer l’information par des voies différentes, et vendu aux Etats-Unis, a été un des vecteur de développement d’internet dans le civil. Certaines applications se sont développées récemment pour cette fois-ci utiliser ce maillage dans sa globalité afin de morceler l’information à la base pour ensuite la reconstituer à destination sans que son contenu puisse être intercepté. Une des meilleures justifications de l’IE au profit du militaire est la possibilité pour ces derniers de pouvoir tirer parti des apports de la Direction Générale pour l’Armement, véritable lien avec le monde et les méthodes globales de l’entreprise, pour veiller à une prise d’information, une prise de décision et une organisation équilibrée pour assurer des missions toujours plus complexes..

Les responsables d’entreprises désormais apprennent volontiers les techniques militaires simples et efficaces et bénéficient des techniques de veille proposées par d’anciens militaires reconvertis. Mais l’entreprise fait la guerre commerciales tous les jours et peut aussi montrer au comment voir globalement et mieux comprendre son adversaire et déjouer les pièges, notamment du cheval de Troyes informatique qui peut détruire toute une vie. Peu à peu, les militaires et les personnes liées au domaine de la sécurité prennent conscience qu’il existe un monde en dehors du leur et que certaines méthodes stratégiques, marketing, humaines utilisées dans l’entreprise peuvent leur être d’une certaine utilité afin de mener à bien leur mission. C’est un peu comme si ce vecteur militaire avait intégré les entreprises en s’enrichissant  au passage d’autres méthodes des savoirs faire, des savoir être pour revenir dans la défense et ses composantes et mieux les faire valoir de façon individuelle et collective. Un regard novateur sur les auditeurs du cours supérieur d’Etat Major a fait prendre conscience qu’au-delà d’appliquer un processus appris, la connaissance de l’adversaire et de ses modes de fonctionnement pouvait aussi orienter bâtir certaines options et définir certains choix avant de passer à l’action de façon réaliste et réalisable.

Désormais  l’approche globale et l’attitude industrielle et économique sont au service de  la protection du patrimoine national. La « guerre économique » s’opère même vers nos alliés militaires pour protéger une fois de plus notre indépendance nationale, nos marchés de défense, nos industries stratégiques et sensibles. La recherche de défense contribue moins mais toujours à une certaine part de développement de l’industrie civile, qui permet à notre pays d’avoir un rôle et surtout un poids prépondérant en matière d’économie mondiale. L’IE nous permet de comprendre que les budgets de R&D européens ont été aspirés pour le F35 qui n’a aucune légitimité opérationnelle. L’IE nous a fait gagner dans une certaine mesure les négociations et conserver notre identité dans la lutte industrielle que nous menions à l’OTAN pour les choix de senseurs face aux solutions britanniques et américaines. L’IE aurait pu nous faire intervenir pour empêcher les Japonais de changer de fournisseurs de canon quand nous avons perdu la guerre de 1870.  L’IE peut aussi servir le politique américain pour protéger les deniers publics quand les industriels de l’aéronautique clament à chaque fois que les avions russes sont plus sophistiqués pour avoir davantage de budget alors qu’à chaque fois il n’en n’est rien.

Qui de l’occident ou de l’URSS a trouvé le premier la forme du supersonique entre le concorde et le Tupolev ? La créativité allemande s’est répartie de part et d’autre de Berlin après la guerre et chacun possède sa version mais seul le Concorde a été un succès technologique mais un gouffre commercial, un peu comme la formule 1. Le Tupolev était-il un lièvre ou une copie. Un autre cas d’école est la désinformation produite pour la dynamique de la course à la guerre des étoiles qui a asphyxié la Russie et donc son économie avec les risques de guerre sous jacents évités de justesse grâce à la sagesse est-allemande … protection bien préparée L’IE aurait sans doute pu aider les Japonais a réfléchir avant de revendre des composants électroniques américains et de  voir le robinet d’approvisionnement coupé, comme par exemple aussi de s’installer au Vietnam à la place des Français au risque de créer le blocus énergétique américain et de réagir comme à Pearl Harbour entraînant les Etats-Unis dans la guerre avec l’issue que l’on sait.

A l’heure où l’on découvre la face cachée de l’iceberg des coûts de maintenance, les exercices d’approches globales s’avèrent également utiles à la gestion de nos forces, dans la gestion des matériels et des moyens afin de permettre une meilleure continuité des opérations extérieures mais également intérieures en cas de besoin.

Enfin, la vision globale de l’IE peut  aider nos industriels à optimiser les obligations de compensations industrielles, commerciales ou financières dans les ventes d’armement et de matériel de haute technologie dérogeant au commerce international et qui permettent à certains pays d’accéder plus facilement à de vraies compétences ou certains marchés au détriment des nations industrialisées.

S’agissant de la défense civile, l’apport de chaque composante de l’IE ou de leur approche transverse peut rendre nos actions plus efficaces tout en étant conscient de nos réalités spécifiques. L’étude des risques comme l’étude de la protection avant d’attendre de gérer les crises, la veille et l’analyse des approches comparatives dans les autres pays ou continents comme apports intéressants pour gérer nos problématiques ou pour communiquer peut éviter certaines erreurs peu facilement réparables, permettre une efficacité de réaction voire même arrêter ou déconstruire certains sites suite à certaines catastrophes naturelles comme des inondations  ou comme le risque limité certes mais présent de tremblements de terre. La défense civile fonctionne naturellement bien au Japon qui ne s’attendait pas à une catastrophe dans une de ses centrales par défaut de moyen de refroidissement.

Quand les avions ont percuté les tours, les services américains savaient mais attendaient le moment ultime comme quand on remonte une filière. Mais cette date n’était elle pas prévisible ? Dans les conférences militaires et d’économie de défense, nous répétions toujours « ce monde est dangereux » en nous focalisant sur une menace identifiée. A la chute du mur de Berlin, une adaptation fut nécessaire pour rapidement apprendre à détecter et éteindre des risques diffus et des flammèches dans la moitié du monde, surtout avec l’apparition de nations de l’Est orphelines disposant de l’arme nucléaire, ce qui a précipité le processus d’intégration avec des risques d’indigestion et au détriment, cette fois, de l’économie. Mais c’est un vrai ennemi qui est apparu sur un territoire où on ne l’attendait pas. Le risque se transformait de nouveau en menace et il était urgent d’attendre… Après analyse, l’objectif était de réaliser une vengeance en occident dans un monde désormais rejeté par une personne et un clan, en faisant ressortir certaines valeurs religieuses, en frappant fort, de façon imprévisible, sur un symbole défiant à la fois le pouvoir civil de l’argent civil et militaire. Les réalités mettaient en avant certains moyens financiers, peu d’armes, peu de troupes mais la connaissance des réseaux d’information internationaux, une veille concentrée sur certaines zones géographiques… Les  options portaient certainement sur le lieu géographique, la date et les moyens à employer.

Que nous enseignent certaines dates ?  En assemblant les données, cela nous donne un cocktail étonnant : 1609 : Découverte de l'île de Manhattan, 1941 : Début de la construction du Pentagone, 1968 : une Caravelle assurant la liaison entre Ajaccio et Nice s'écrase en Méditerranée, 1972 : Clôture des tragiques Jeux olympiques de Munich gagnés par l'URSS, 1973 : Coup d'État au Chili, 1998 : Les Écossais s'affranchissent. Rien n’indique que feu Ben Laden ait fait cette déduction. Mais même si beaucoup de crises sont désamorcées sans le commun des mortels en soit informé, certains éléments méritent parfois d’être mieux pris en considération avant qu’il ne soit trop tard. Je me garde le droit de penser qu’un agent, un peu trop conceptuel, n’a pas été écouté. Qui a trouvé la nouvelle date ?

La sécurité liée à la sécurisation de nos centrales doit-elle éviter de nous poser certaines questions globales liées à de tels effets potentiels sur la population et sur les moyens de subsistance pour éviter le chaos ? A l’heure de l’hyper-information, doit-on encore faire croire que les radiations s’arrêtent aux frontières ?

 

*             *             *

 

La défense militaire et la veille, s’inscrivant généralement dans lune certaine dynamique, l’emportent souvent sur leurs deux autres composantes respectives. C’est oublier que pour retrouver ses forces, une bonne assise ne pourra se faire que sur au moins trois piliers. C’est sous-estimer également le poids relatif mais réel des défenses économique et civile. Ces notions d’approche globale sont souvent peu appréhendées, communiquées ni maîtrisée mais la partie est sauve si une personne ou organisme parvient, en porteur de sens, à tisser un lien et créer un fil rouge entre les composantes et leurs acteurs afin qu’ils puissent travailler telle une équipe performante et autorégulée.

Airbus a contribué à faire l’Europe et l’intelligence économique certainement utilisée de façon globale a affirmé l’identité européenne et donc son poids sur la scène internationale. La chasse en meute européenne pour la veille, pour la sécurité et le lobbying avec chacun avec nos différences, est une force.  Des groupes industriels transverses comme EADS, Thales y parviennent un peu l’une avec son ciment franco-allemand, l’autre avec son approche multi-domestique  L’A 400 M, sa polyvalence et son essaie de maintien en condition opérationnel similaire pour chaque pays la consolidera peut-être. 

La dynamique de recherche de l’Union, confirmée dans le traité de Lisbonne, laisse apparaitre désormais une vision plus globale au-delà des simples outils. Certains projets sont lancés dans le domaine de l’information. A l’heure où l’Union européenne est en recherche de positionnement, il serait intéressant de comprendre les objectifs, les réalités et les différences d’appréciation de chaque pays sur chacune des trois composantes de la défense nationale, si elles existent. L’OTAN est certes un vecteur d’intégration européenne mais une défense européenne peut exister. Au même titre que les aspects d’interopérabilité et de coûts logistiques peuvent amener les militaires et in fine les industriels à  travailler ensemble, un travail d’approche commune sur les aspects économiques et civils de la défense, facilité par l’intelligence économique, sera peut-être un vecteur de facilitation pour une défense militaire et globale commune.  

 

 

[1] Les Fabliaux du Management – François CHARLES -  Editions Chiron  juin 2003

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DE L'ETHIQUE FINANCIERE EN SITUATIONS DE CRISE

30 Mai 2020 , Rédigé par francoischarles Publié dans #philosophie, #économie

L'éthique financière des situations dites ou pouvant être considérées comme normales, peut déjà poser questions dans certains domaines d’activité. Celle des situations de crise, voire de guerre latente, ouverte ou assimilée dans de nombreuses situations, nous en pose d’autres, notamment relatives au pouvoir, à l’empathie, à la solidarité et elle peut aussi aider à faire évoluer la normalité.

 

 

Par François CHARLES, économiste, conseil en stratégie, management, affaires européennes et internationales

 

La crise sanitaire actuelle nous ouvre les yeux sur les différences de perception, en équité ou égalité de traitement, surtout financier. Elle a été considérée comme une guerre par le Président de la République française, assez isolé en Europe sur ces mots, mais cherchant sans doute aussi le moyen de montrer son rôle voulu de leader responsable, voire opérationnel de la défense de l’Europe.

 

Parfois des crises sont appelées des guerres, notamment pour mieux faire passer certaines mesures d’état d’urgence en plus de sensibiliser les populations. Parfois des guerres sont appelées crises pour les minimiser tant qu’elles ne sont pas totalement des guerres. Enfin, des guerres vues par certains ne seront que des crises pour d’autres.

 

La finance est le nerf de la crise, comme de la guerre. Les impacts financiers et économiques seront plus ou moins forts entre les hauts ou bas revenus, avec ou sans risques de salaires. Il existera sans doute des différences de survie, voire de jalousie, en plus des réalités normales de concurrence entre d’une part, les start up ou organismes bénéficiant de financements publiques pour la recherche et les entreprises liée aux marchés de l’Etat, sauf si ce dernier change finalement d’avis par répartition du financement, et d’autre part, les entreprises liées au marché privé qui voient leur carnet de commande à zéro et obligées d’offrir des prestations pour maintenir le lien alors que d’autres  augmentent le leur du fait de cette situation.

 

Y aura-t-il solidarité entre les chaînes de télévision privées pourtant si riches en temps normal grâce à la publicité, par rapport aux chaînes publiques disposant surtout d’un revenu fixe convoité en temps de crise. Y a-t-il également solidarité entre constructeurs et mainteneurs indépendants dans le domaine des transports notamment aéronautiques ? Les acteurs n’ayant pas agi contre le COVID seront-ils montrés du doigt et voués à l’exil, quasi impossible étant donné que toute la planète a été touchée ? Les rachats, fusion-acquisitions générées par la crise, où les victimes ne sont généralement pas sauvées mais persécutées puis évacuées pour ne conserver que la substantifique moelle, ne seront-elles pas plutôt des crises surtout familiales plus que des sauvetages ? Les comptes auront-ils été maquillés pour mieux les faire passer comme pour la Grèce, même avec un auditeur reconnu et indépendant des actionnaires ? Le rachat d’une entreprise par un fonds de capital- risque, parfois réels acteurs de politique industrielle, est-il réel sauvetage ? Doit-on fermer le dossier ou a-t-on compris que cette pépite, souvent stratégique, sera à nouveau sur le marché à terme ?

 

Qu’en est-il du délai de traitement et du droit des réservataires en cas de faillite d’entreprise, petite ou grande, ou stratégiquement protégée ? S’agissant de certaines crises financières personnelles, après avoir touché une somme d’argent faut-il mieux rembourser ses créanciers ou en conserver une partie pour payer une pension alimentaire et éviter toute poursuite pénale et se laisser un matelas de sécurité pour continuer à vivre normalement et continuer d’amorcer la pompe sociale ?

 

Les accords de partenariat, quand ils ne sont en fait plutôt parfois d’ailleurs que des accords d’achat, seront-ils maintenus ou revus alors que des aides financières ont été accordées par les Etats ?

 

Les mots magiques comme solidarité, sens, résilience apparaissent pour donner bonne conscience. Mais on pourra se poser la question des demandes d’aides réellement  justifiées, des octrois de déplacement ou de financement trop facilités ou refusés, en face de réels besoins, pour aider les plus démunis ou ceux qui ont un écart de revenu plus élevé ? On pourra se poser la question des choix d’actions immédiats vers le peuple, les élites, les institutions, l’économie, la défense, ou l’écologie, ces deux dernières étant souvent considérées comme variables d’ajustement.

 

Et qu’en est-il finalement de l’éthique, ensemble des principes et fondements moraux de conduite, sur la base de règles de comportement jugées bonnes ou mauvaises, et souvent par discernement intelligent. Elle sera généralement liée à l’homme et sa faculter de penser et séparer le bon grain de l’ivraie, avec ses propres lunettes et en pleine conscience de certaines réalités, notamment du pouvoir et des dogmes. Galilée, condamné par l’inquisition, vient seulement d’être réhabilité.

 

Quelle éthique financière appliquer en matière de peine civile ou pénale entre les parties, notamment envers l’Etat ?  Quelle vengeance privée utilisera le droit pénal pour compenser une compensation financière civile impossible ? Quelle sera l’éthique et le discernement du juge dit « de bonne foi » ou quelle médiation ou conciliation pourront-elles être proposées et acceptées ? Qui en profitera en toute puissance pour charger et tuer sans aucune meilleure solution de rechange ou pour effacer le litige de bonne grâce ?

 

Ethique et solidarité ne signifient-elles pas payer ses factures et ses mensualités de prêt, plutôt que conserver la trésorerie par sécurité sans partage de risque ni d’empathie dans une logique du chacun pour soi ? Parlerons-nous d’éthique ou de choix stratégiques et surtout politiques pour l’octroi de financements, a priori garantis par l’Etat ou les Institutions, qui ne pourront généralement ensuite pas être remboursés ? Parlerons-nous d’éthique ou d’empathie pour l’effacement de dette par mesures keynésiennes de circonstance plutôt que l’afficher avec courage dès le départ ? S’agira-t-il de financer ou d’assurer sans réel contrôle de solvabilité dans l’urgence et ensuite exiger un remboursement sans aménagements ? Bien entendu tout le monde pensera in fine, et sans doute à raison, que ce sont les banques, qui prêtent même aux Etats qui ne peuvent les contrôler, ou qui vous blâme de ne pas avoir réparé votre toit en été faute de financement, qui gagnent à tous les coups. Les pauvres, eux, connaissent la valeur d’une goutte d’eau, d’un paquet de farine et d’une ampoule électrique comme quand on sort d’un rationnement respecté ou non, en temps de guerre ou de famine, qui ne devraient plus être d’actualité notamment grâce aux cultures élevées dans les sous-sols à la lumière artificielle protégés des aléas terrestres. Les anciens pauvres sauront aussi parfois le rester et gérer leurs biens avec soin et sans excès, comme la Norvège, autrefois bien moins riche et désormais courtisée avec son fonds convoité.

 

L’éthique financière du non-profit, qui devrait exister en temps de crise sanitaire, et comme donc théoriquement aussi en tant de guerre, ne sera pas ressentie par tous de la même façon. Certains débloqueront des fonds pour prendre soin presque par altruisme et par couvage ou portage. D’autres en profiteront pour créer de dépendances, racheter les autres ou profiter des efforts de recherche pour simplement fonctionner, voire faire des profits avec les résultats de recherche financée, en remerciant même le phénomène sans pour autant l’avoir déclenché. D’autres enfin, tenteront simplement de valoriser de vieilles recettes et d’anciennes formules à moindre coût avec ou sans recherche de profit. Les laboratoires doivent-ils réclamer un retour sur investissement sur la recherche, et notamment sur les applications à effet rapide, ou mettre les solutions au profit de tous, comme le fait le CERN et désormais l’UE sur la recherche fondamentale ?

 

Qu’en est-il de l’éthique financière des primes versées aux personnels hospitaliers qui font leur travail avec passion mais ou oubliant de s’alimenter et de dormir. Sur quelle base doivent-elles être évaluées, de façon aléatoire pour tout le monde pour calmer une crise ou alors pour couvrir des charges calculées et réelles fixes ou variables ou pour compenser à long terme les dépenses liées aux conséquences de l’activité, ou des suites de maladies directes et indirectes ou de risques liés au métier.

 

Qu’en est-il de l’éthique financière des RTT désormais accordés même aux militaires pourtant corvéable théoriquement 24 h / 24 et qui touchent des indemnités de services en campagne alors qu’il s’agit plutôt d’une généralité pour la France plutôt impliquée à l’étranger. Peut-être est-ce pour éviter de prendre le butin sur le terrain comme autrefois ? Le soldat devient-il un mercenaire de l’indemnité ? Enfin, quelle éthique et solidarité engager pour les anciens combattants traumatisés et pour combien de temps ? Une médaille, également geste politique mais dont on est fier de porter et faite pour cela, et qui n’aide pas forcément à faire bouillir la marmite, ne suffirait-elle pas ? Nul besoin de choisir qui la mérite ou non quand les médailles de la défense nationale sont décernées en masse. Qu’en est-il  de la solde du soldat qui est aussi là pour être utilisée afin d’acheter un matériel en urgence sans même être en guerre sous prétexte qu’il a une solde.

 

Les mesures en situation de crise ne doivent pas être la normalité mais peuvent l’orienter pour limiter la prochaine crise. Les solutions sortent des chapeaux mais sans forcément voir le risque à payer plus cher en cas de crise, considérant qu’il s’agit de préserver des intérêts vitaux, qu’il faut détenir coûte que coûte, lorsqu’on parvient à les définir et sauf à mieux regarder d’autres solutions ailleurs. La gouvernance de temps de crise impose des décisions exceptionnelles qui peuvent ensuite rester usuelles. Mais les gouvernances de temps de paix ou de normalité engendrent aussi des règles qu’il faut consolider.

 

S’agissant de l’éthique financière de la monnaie, l’euro, qui n’est pas forcément né d’une crise même si poussé par la France qui en redoutait une. Mais il provoqua ensuite une forte inflation non dite pendant sa mise en place suite au rejet des centimes à son apparition. l’Allemagne, gardienne économique de l’euro qu’elle ne voulait pas, sait se rappeler ses vieux fantômes qui l’empêchent de dormir, voire les oublier quand il s’agit de faire rentrer la dette grecque. Notons que les Etats-Unis avaient créé le D. Mark, comme avaient aussi prévu de recréer une monnaie française en 1945, pensant le pays incapable de se relever après cette crise ou désirant peut être désormais mieux le contrôler suite aux déceptions engendrées par une défaite a priori impossible et une perte de confiance dans ce pays qui les avaient à nouveau poussé à intervenir en Europe.

 

L’euro a ensuite sauvé bien des crises financières par mutualisation et uniformisation, avec ses avantages et ses contraintes, tout en laissant aux Etats qui ne souhaitaient pas perdre pour autant leur âme, une certaine diversité et identité symbolique, sur chaque pièce et billet.  Charlemagne l’avait déjà compris avec la première monnaie européenne. Les mesures de souplesse pour le dépassement des 3% et des 60%  en cas de crise doivent être généralisables mais doivent aussi finalement laisser, en période normale, une certaine ouverture fiscale pour que chaque état puisse  atteindre seul ses objectifs ou disposer d’une certaine marge de manœuvre et autonomie pour ses besoins propres. On peut d’ailleurs se poser la question de la notion de financement de la dette de certains pays sauf si bien entendu il s’agit de solidarité toute chose égale et tout risque égal par ailleurs. Ou alors est-il peut-être temps de créer des sous-groupes d’économies sans discrimination mais avec des mesures adaptées pour éviter tout risque de propagation de la crise entre eux et toute rupture de membrane externe.

 

En matière d’éthique de solidarité financière interne européenne, il est bon de se rappeler que les Etats libres d’Allemagne, ou Länders, l’organisent entre eux depuis longtemps, avec ou sans demande de juste retour en équité ou égalité de contribution, ce que les Etats centralisés comme la France ne connaissent pas. Pourquoi l’Allemagne ne parlerait-elle par pour l’UE en bonne mère de famille européenne pour l’économie, comme la France essaie de le faire au niveau diplomatique et militaire ? Que penser du récent plan de relance européen plutôt politique que réaliste, même si les Institutions, qui savent d’ailleurs créer des fonds de secours, tentent aussi d’expliquer clairement d’où viendra a priori l’argent ? Par ailleurs, ne faudrait-il pas finalement miser sur des obligations convertibles en or, valeur refuge en temps de crise et de guerre ?

 

Qu’en est-il de l’éthique financière d’intégration européenne en temps de crise ? Les pays du centre européen ne sont-ils pas trop vite rentrés dans l’UE, certes après leur sortie du bloc de l’Est alors qu’ils étaient exsangues. Mais ils étaient aussi en crise et en quête de retrouver leur identité en apportant également leur propre vision de l’Europe en déplaçant aussi son centre de gravité. La réunification de l’Allemagne n’a-t-elle pas été finalement uniquement financée par elle-même sans grande solidarité sauf interne au sein du pays ? Attendait-elle un soutien ou l’a-t-elle peut-être en fait refusé par orgueil comme les Etats-Unis l’ont fait en rejet de l’art 5 de l’OTAN le 11 septembre 2001 sauf ensuite pour finalement aller guerroyer en Irak en mutualisant les frais entre coalisés pour se faire bien voir de l’ONU alors qu’ils n’ont en fait besoin de personne, contrairement à la France qui voudrait faire seule mais ne le peut financièrement plus.

 

S’agissant de la crise climatique, existe-t-il une éthique de financement du pacte vert sous couvert d’un dogme impossible à attaquer sous peine d’être jugé et autrefois brûlé ? Le réchauffement climatique est-il finalement une crise ou une normalité, voire une guerre avec une éthique liée à la santé et notamment celle de la planète ? Le pacte saura-t-il résister au fait que le Corona Virus a fait gagner un répit de 15 ans pour 1,5°C. Et en parlant de virus, qu’en sera-t-il si une prochaine catastrophe Nucléaire, Radiologique, Biologique et Chimique (NRBC) survient ? L’Europe ne devrait-elle pas posséder ses centres d’excellence, même avec le risque lié à ce terme a priori intouchable, comme certains hôpitaux dans chaque grande région européenne, et surveillés par des unités armées de type Frontex qui dispose désormais d’un budget propre ?

 

L’art n’est pas exclu de cette liste non exhaustive. On le met volontiers à l’abri en temps de crise, non pas de peur qu’il soit détruit ou même acquis de droit, qui change souvent en temps de guerre, mais de peur d’être pris pour compenser des dettes, voire même volé pour profiter à d’autres ou être réparti entre d’autres qui n’en voient que la valeur marchande et alimentaire.

 

Contrairement à la guerre, la crise  ne casse pas tout, même si des frontières peuvent réapparaître et si les décisions prises imposent finalement de casser. Le système financier n’était pas cassé et est vite reparti en 1929 aux Etats-Unis dès que la décision sur les 6000 banques a été prise, qui a comme quand on rase des immeubles atteints par la guerre ou délabrés par la crise. Il en a été de même avec les supprimes mais sans doute n’était-ce pas là une guerre impactant la santé des citoyens ?

 

Mais qu’en est-il de l’éthique financière des reconstructions ? La crise liée à l’incendie de Notre Dame bâtie avant 1905, nous rappelle que si l’Etat est son propre assureur, il peut donc décider de reconstruire ou non, dont également ses établissements publics dont industriels qui lui restent. Cela ne lui empêche pas non plus de prendre une assurance ou de l’analyser pour rendre ses personnels encore plus attentifs aux mesures de sécurité. Notre Dame était même assurable grâce à la connaissance potentielle des sommes engageables car bien des cathédrales ont été reconstruites au siècle passé. Serait-ce aussi le cas du château de Versailles jugé non assurable ? Rappelons-nous par ailleurs que la crise du 11 septembre fut un exemple d’éthique et de solidarité financière entre assureurs, qui ont pris chacun leur part sans renvoyer la faute sur l’autre sur cette crise particulière qui ensuite engendra une réelle situation de guerre ? Que doit-il en être des catastrophes naturelles telles tremblements de terre, éruptions, ouragans, inondations causées par la terre qui n’arrête pas de vivre ni de tourner même au 21° siècle avec parfois de difficiles indemnisations ? Revenant sur le dérèglement climatique, prenons aussi en compte qu’il transforme les catastrophes naturelles en événements réguliers et assurables avec leur primes liées.

 

La gestion de la crise peut éviter la guerre sauf quand des pays, organismes, assemblées  ou des personnes cherchent à l’alimenter. La crise peut s’éteindre ou engendrer la guerre, même pour le COVID où la Chine se trouve accusée d’avoir ouvert la boite de pandore du virus. Certains rappelleront que « qui veut la paix prépare la guerre ». Mais tant que la guerre n’est pas déclarée, il s’agit d’une crise sauf quand l’adversaire ne le comprend pas, comme en 1914 entre l’Allemagne et la Russie, quand cette dernière amassa ses troupes dans l’attente, interprété par la première comme une déclaration de guerre. L’état d’urgence est peut être aussi une autre subtilité du droit entre la crise et la guerre pour faire reculer la guerre ou mieux la préparer, avec des dispositions législatives et financières propres et autonomes. Si la crise devient guerre officielle ou non, à qui va profiter le droit du sang versé au combat pour participer en tout ou partie à la reconstruction d’un pays dévasté ou le plan Marshall décidé?

 

Que penser de l’éthique financière de l’effort de défense d’un pays en crise, pour réarmer ou appeler à la mobilisation, lié à sa politique et souvent proportionnel à sa taille, sa puissance financière et ses alliances militaires et capacitaires. Les courses aux armements en guerre froide, qui n’est d’autre qu’une crise, peuvent détruire des empires par essoufflement en provoquant parfois certaines guerres de baroud d’honneur. Bientôt connaitrons-nous heureusement les conflits par jeux vidéo sans victimes ni dégâts ou entre robots tueurs même si déjà condamnés par certaines assemblées. Certains pays achètent aussi des armes simplement par dissuasion pour ne pas s’en servir car n’en ayant en fait pas les moyens ou s’achètent même des leurres. D’autres en profitent pour constituer une industrie de défense notamment en lien avec la souveraineté nationale et surtout en profitant de contreparties octroyées par les vendeurs dérogeant toutes les règles du commerce international.

 

Qu’en est-il de l’éthique financière du contrat de d’armement en période de crise et ensuite en temps de guerre, quand il faut « mettre le paquet ». Qu’en est-il des règles de coûts objectifs, livres ouverts, partage des risques, bonus et malus, qui ne sont que trop peu  appliquées en temps de paix ? Les règles commerciales et de droit changent-elles en temps de guerre et avec quelles sanctions différentes, comme pour la non-exécution d’un ordre reçu ? Pourquoi avons-nous l’impression que les entreprises d’armement, pourtant contrôlées par des structures d’enquête de coûts, et qui devraient plutôt produire au juste prix et avec marges réduites pour les contrats nationaux, semblent profiter de la crise certes sur des produits qui se vendent épisodiquement ? Ne devraient-elles pas toutes se diversifier dans le civil, sauf à entretenir une tutelle de sauvegarde cloisonnée et spécifique sous couvert de souveraineté nationale qui devrait être désormais européenne ? A contrario, il est vrai que les industriels majeurs savent proposer de différer les paiements attendus de l’Etat, avec ou sans contreparties lors des périodes de défaut de paiement de l’Etat, même sans être en guerre. Ils savent aussi convenir d’arrangements de dépendance avec leurs sous-traitants, quand il ne s’agit pas de risque de cavalerie d’investissement avec une solidarité et une prise de risque souvent vite oubliées. Mais n’est-ce pas un privilège de participer à un domaine stratégique ? Enfin, si la production est une chose, la maintenance en est une autre, encore plus importante en terme de coûts, et vendue à prix d’or sous prétexte d’une fausse envolée des coûts, désormais par des contrats à long terme incluant les opérations extérieures. Et que dire de l’éthique financière des programmes en coopération de défense qui sont encore plus chers que réalisés sans et qui vivent du fait des états participants même s’ils peuvent néanmoins se dédire ? Enfin, pouvons-nous lutter éthiquement contre les Etats-Unis qui vendent à prix coutant, prêtent du matériel et même de l’argent ? Pourquoi ne pas continuer à bâtir des contrats commerciaux comme l’A400M ?

 

Les ventes d’armes sont tirées par les crises dans le monde, sans oublier le théâtre européen. Elles font vivre des centaines de milliers de personnes de façon directe et indirecte, tirant souvent l’économie et la recherche, dans des entreprises  désormais de droit privé en France, sauf un dernier bastion dans le secteur de la maintenance aéronautique protégé coûte que coûte par un principe de sécurité, qui devrait être moins cher car garanti alors qu’il s’avère plus cher car nécessaire. En temps de paix, les ventes d’armes par les industriels français sont « interdits sauf autorisation » très contrôlée à partir de la situation risquée de chaque client et peuvent être gelés comme avec l’épisode russe, qui soulevé certaines réactions sans considération des conditions initiales. Les ventes à l’export ne sont pas seulement des succès technologiques et même financiers pour faire baisser les coûts unitaires nationaux, mais bien des actions,  décisions et choix politiques. Les personnes condamnant ces activités sous le couvert de l’éthique seront souvent les mêmes qui manifesteront en cas de licenciements.

 

Avec quelle lunettes la France doit-elle décrypter et accepter l’éthique allemande, qui ne fait pas la guerre mais la soutient industriellement et logistiquement en solidarité et qui, en matière de vente,  affiche une réserve stricte sur les atteintes aux droits de l’homme inscrite dans sa constitution et non à la carte en fonction de l’intérêt stratégique ? L’harmonisation européenne en la matière est encore à consolider mais peut-être devrait elle s’abriter sous un label uni dans la diversité, avec une éthique de base et un socle commun le plus élevé soit-il, laissant néanmoins de possibles spécificités, afin de vivre et de construire en intelligence et équilibre ? Pour revenir à la santé, ne doit-il pas en être de même pour les produits chimiques dans une certaine éthique, comme pour d’ailleurs l’innovation, dont l’éthique de financement, en parfaite connaissance des risques, devrait prendre davantage de place.

 

 

 

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Réapprenons les 8 et 9 mai

9 Mai 2020 , Rédigé par francoischarles Publié dans #défense

En ces 8 et 9 mai, même si certains semblent dire qu’il ne faut pas rester immobilisés par l’histoire, et d’autres écrivent qu’il faut sauver leur vision de l’Europe, il est important de nous rappeler qu’une bonne fée était arrivée sur les relations militaires franco-allemandes, cette fois pour penser le changement plutôt que changer le pensement. Mais cette guerre était mondiale.

 

Par François CHARLES

Economiste, conseil en stratégie et management, affaires européennes et internationales

Si les cicatrices peuvent rester, comme les trous sur la planche à clous, il convient d’en faire une construction sur l’avenir.

 

Réapprenons la vraie fête de la capitulation avec signature française dans la nuit du 8 au 9 mai 1945 mais aussi et surtout fête de l’Europe le 9 mai en 1950, date trouvée sans doute non par hasard, avec la déclaration de Robert Schuman préparée par Jean Monnet sur une future organisation européenne, dans l’espoir de relations pacifiques lies sur le commerce, sous une certaine bienveillance, voire douce violence, étasunienne.

 

Vainqueurs ou vaincus durent ou doivent toujours faire certains deuils négatifs ou positifs avec ses causes et ses conséquences, comme dans toute analyse de risque, mais surtout ses phases de coups de théâtre plus ou moins prévus et annoncés, de dénis, de colères, de recherche de compréhension et de reconstruction, si possible avec un coup de tamis salutaire et une meilleure solution de rechange. Mais de quels deuils parlons-nous ?

 

Deuil de la malheureuse vraie étincelle initiale de la perte des territoires par la France en 1870, pourtant sauvés par le traité de Vienne, qui les a retrouvés au moins géographiquement (…) en 18 avec un traité jugé irréaliste et irréalisable envers l’Allemagne, finalement non respecté, et qui a nourrit la revanche allemande contre la France, vrai et unique objectif d’Hitler, qui a au moins gagné dans la perte d’identité française.

 

Deuil militaire allemand de n’avoir su rester sur le continent et contrôler l’Europe, allié à Staline à l’est, connecté au Japon et à la Turquie au Sud avant de pousser les Etats-Unis à rentrer en guerre avec une place décisive comme en 1917. Deuil mental allemand d’avoir cru et soutenu un leader élu, ayant relancé l’économie, été déclaré homme de l’année par le Times, avant de jurer qu’il ne l’avait jamais voulu.

 

Deuil de la France d’avoir perdu un temps son identité, certes reconquise avec du matériel étasunien pour retrouver son honneur et sa vraie valeur si possible sa place dans le concert des nations d’influence militaire et donc stratégique qu’elle défend plus que jamais sans mettre d’autres lunettes. Deuil personnel de De Gaulle de n’avoir pas été considéré par les alliés qui ne croyait plus en la France qui avait pourtant la plus grande armée au monde et qui avaient du revenir en Europe pour ne plus cette fois en repartir.

 

Deuil des anglo-étasuniens d’avoir voulu oublier que leur allié russe de circonstance, à qui ils avaient livré des armes et aidé à reconstruire ses usines, et qui avait commencé à se partager le monde avec Hitler, était redevenu belliqueux en toute puissance.

 

Deuil de Staline et des Russes d’avoir été trahi par Hitler et les Allemands et de réclamer la plus grande part du gâteau au vu des dévastations en oubliant sa position opportuniste d’origine

 

Deuil des Etats-Unis de n’avoir pu s’imposer durablement en France comme en Allemagne avec notamment création de l’administration et de la monnaie, d’avoir du accepter la France et De Gaulle soutenu par la Russie et de n’avoir pu installer le plan Marshall, considéré aussi comme profitant essentiellement aux Etats-Unis, à tous les pays du centre Europe.

 

Deuil de certains pays ayant perdu leur âme en quête d’une nouvelle identité qu’ils tenteront de retrouver ensuite et encore actuellement.

 

Mais deuil aussi et surtout des familles des millions de morts militaires et civils dans chaque camp, sans revendiquer qui est le plus mort pour qui, victimes des combats, bombardements, famines, déportations, exactions et exterminations qui imposeront la mémoire.

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